Claire Gillie


Psychanalyste, musicologue, enseignante et chercheur, elle a soutenu une thèse de doctorat sur « La voix au risque de la perte ; De l’aphonie à l’ (a) phonie ; l’enseignant à corps perdu », à Paris VII (Anthropologie psychanalytique).
Elle a effectué une traversée, ethnomusicologique (Musée de l’Homme, Paris, CNRS) et sociologique (DEA de sociologie).
Elle est chercheur associée au Laboratoire CRPMS (EA 3522) de Paris 7, chargée de cours à Paris 7 (Etudes Psychanalytiques), Paris 6 (Master 3 R), Paris 5 (DU de Bégayement et aussi musicothérapie).
Elle effectue des traductions (de l’allemand vers le français) d’ouvrages de Freud dans la collection Psychanalyse et Religion dirigée par Paul-Laurent Assoun au éditions du Cerf ; elle est responsable avec ce dernier du D.U. Voix et Symptômes, Psychopathologie et clinique de la Voix, à Paris 7
Membre d’Espace Analytique (A.M.E.a), elle assure plusieurs séminaires sur des thématiques croisées.
Elle privilégie l’approche transdisciplinaire de la voix et de l’écoute, à la croisée des savoirs, mais aussi de ce qui structure tout sujet dans son rapport à lui-même et à l’autre.
C’est depuis cette traversée multiple qu’elle poursuit ses recherches, afin de faire entendre cette « pulsion invocante » non sonore, qui pourtant travaille en sourdine derrière (et parfois contre) celui qui prend la parole et veut « donner de la voix ».
Elle dirige la collection Voix & Psychanalyse chez Solipsy, et coordonne la publication annuelle des Actes des colloques Voix/Psychanalyse (2010, 2011, 2012, 2013). Elle vient de publier également chez Solipsy une bigarrure de miscellanées : Voix Eperdues
 


Dans la gueule du loup : une voix bifrons

La voix diplophonique (une dysphonie) et la voix diphonique (un art) font entendre un larynx divisé entre deux voix se faisant entendre simultanément, et qui font du sujet orateur ou chanteur, un Janus bivocal, diplophonique, émettant une voix « monstrueuse » et « bestiale » d’où émerge le « hors-sexe » des harmoniques flottant « hors-corps ». La dernière recherche engagée par Michel Poizat avant sa mort devait le conduire à une publication sur « la voix du loup », et au cours de ce travail - connaissant ma recherche en lien avec celle de Trân Quang Haï sur le chant dit « chant diphonique » - il m’a fait part de l’avancée de ses propres travaux. A cette époque, il tentait de mieux cerner la mythologie mongole qui parlait d’un « Loup bleu » comme fondateur de la lignée des empereurs mongols, après la découverte qu’il fit du roman de Gengis Khan : Yasushi Inouë, Le Loup bleu. Ce roman mentionne le mythe selon lequel ce serait de l'union d'une biche et d'un loup bleu que se serait fondé le peuple mongol. Temüjin, enfant personnage central du roman, s'interroge sur ses origines : le sang du Loup bleu coule-t-il vraiment dans ses veines ? Pour oublier le viol de sa mère par le chef d'une tribu ennemie, Temüjin cherchera, toute sa vie, à travers ses « folles chevauchées » dans le désert de Gobi à l'immensité des steppes, à devenir ce loup mythique, lui, le bâtard.
Je soutiendrai l’hypothèse que la « voix diphonique », est une présentification de la voix perdue d’un chef de la horde, symbolisé par le Loup Bleu ; Loup Janus aux deux visages sonores - celui de tous les dangers et celui de tous les secours - et qui ne peut se faire entendre que dans la rupture de deux voix extrêmes qui creusent une faille dans la « voix unique », l’empêchant de sonner sous un trait vocal unitaire. La voix « humaine » serait absente de ce « no man’s land » sonore qui sépare le bourdon de ses harmoniques.
 

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